u bout de ces sept longues semaines quel regard poser sur la 22e édition du festival qui vient de s’achever? Rappeler qu’elle fut riche, en accueillant 31 chorégraphes aux esthétiques si différentes pour quelque 90 représentations de spectacles dans les théâtres, lieux culturels, salles polyvalentes ou écoles de 41 communes de Drôme et d’Ardèche : ces bilans chiffrés élogieux et rassurants, plus que les bilans financiers, ne racontent pas l’essentiel.
L’essentiel, c’est la magnifique écoute d’une salle embarquée à l’unisson des danseurs, vibrant au dynamisme et à la maîtrise des tous jeunes danseurs du ballet Grenade de Josette Baïz, vibrant à l’énergie superbe du trio Daphnis e Chloé de Gallotta, mêlant grâce, sensualité, ruptures, surprises et décalages. C’est le public qui ovationne Anima, la dernière création de la compagnie Alexandra N’Possee, une danse hip hop virevoltante et créative soutenue par une magnifique création vidéo et sonore qui nous embarque dans différents univers de façon magique! Ceci pour ne citer que quelques exemples des scènes ardéchoises, qu’il faudrait compléter par les grandes programmations des scènes drômoises comme celles de Peeping Tom, Yoann Bourgeois, Angelin Preljocaj, Sylvain Groud, les compagnies Arcosm, Maryse Delente, etc.
L’essentiel, ce sont les découvertes, les rencontres, la mobilisation des bénévoles des associations partenaires et de nos amicales pour que tout se passe bien, ce sont les temps d’émotion et de joies partagées… Ce moment à notre IME de Saint-Barthélémy-Grozon où, les chaises enfin disposées, les jeunes enfin installés, l’attention mobilisée, commence le spectacle d’Annie Delichères Déjà deux mains : un spectacle minimaliste, intime, introspectif tout à l’opposé des esthétiques festives, acrobatiques, démonstratives et rythmiques en vogue chez les jeunes. Regards alternatifs sur le spectacle et sur le public qui extériorise peu de réactions : que pensent-ils, ressentent-ils derrière leurs visages immobiles. Après la représentation et le moment d’échange de questions, quelques uns acceptent de venir participer à un moment dansé, en fait de montrer leur danse, un par un, à leurs camarades restés en public ; et là, sur des extraits musicaux, après bien des hésitations pour se lancer, c’est toute une relecture du spectacle qu’ils nous donnent, avec l’appropriation de certains gestes, avec l’intériorité qu’ils avaient perçue, avec la joie de danser qui s’affirme et qui du coup est accueillie sans quolibets par l’assistance ! Un grand moment !
L’essentiel c’est enfin la grande générosité des artistes qui donnent sans compter leur énergie, leur enthousiasme, leur joie à danser, à partager, qui après le spectacle font encore un temps dansé avec le public ou un free style avec les jeunes, pour les mettre en valeur. C’est, à Chomérac, Virginie Quignaud et Vincent Delétang qui après leur spectacle A deux dans une manche, joué en entier au lieu de l’extrait prévu, parviennent tranquillement et progressivement, à mettre tout le public conquis sur l’espace scénique et à faire découvrir de l’intérieur à cet auditoire non initié, ce qu’est la danse contemporaine ! Un vrai plaisir partagé qui donne tout le sens à ce que veut être l’éducation populaire !…
Annie Sorrel
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